De plus en plus utilisée par les entreprises et les industries, l’intelligence artificielle croise de nombreux enjeux encadrés par le RGPD. Louis Allavena, conseiller en gouvernance et protection des données et délégué à la protection des données au sein du cabinet Rhapsodies Conseil, décrypte les grands principes du RGPD et livre ses conseils pour utiliser l’IA tout en étant conforme à la réglementation européenne.
Selon la dernière enquête Bpifrance Le Lab, seuls 3% des dirigeants de TPE-PME utilisent régulièrement les outils d’intelligence artificielle générative et 12% en font un usage occasionnel. La raison ? Une méconnaissance des usages possibles. Pourtant, l’IA générative apporte de nombreux avantages pour tout type d’entreprise, quel que soit le secteur d’activité. Décryptage avec Hanan Ouazan, associé chez Artefact, cabinet de conseil spécialisé en IA et data.
La création de l’intelligence artificielle dite « traditionnelle » ne date pas d’hier. Elle remonte aux années 1940. L’IA générative constitue, quant à elle, une évolution récente, développée depuis une vingtaine d’années. « La technologie en elle-même n’est pas révolutionnaire, c’est l’usage que l’on en a aujourd’hui qui est novateur » précise Hanan Ouazan, expert en IA et data chez Artefact.
Historiquement réservée à un public technophile, l’IA générative est, depuis peu, un outil accessible à tous pouvant avoir un impact sur l’intégralité des secteurs d’activité et des métiers. Alors que l’IA traditionnelle s’est limitée à des taches d’induction ou de prédiction de comportement, l’IA générative offre la possibilité de créer du nouveau contenu à partir des données existantes. Avec la démocratisation de ces outils, toute entreprise peut tirer profit de l’IA générative en fonction de ses objectifs. Hanan Ouazan définit 3 usages principaux de l’IA générative en entreprise.
Les 3 grands usages de l’IA générative pour les entreprises
Améliorer la productivité
Grâce à l’implémentation de l’IA générative dans les outils du quotidien (Microsoft, Google, Adobe…), les entreprises peuvent gagner en productivité en optimisant leurs processus de travail.
Par exemple, le support client peut être facilité grâce à l’IA générative qui va réaliser un compte rendu d’appel et ainsi préremplir les fiches clients. Elle peut également permettre aux collaborateurs de synthétiser un long document de travail, de retranscrire un appel téléphonique, de traduire des mails, d’effectuer des relances automatiques, etc.
« Puisqu’il s’agit de fonctionnalités ajoutées à des outils déjà intégrés dans le quotidien des collaborateurs, il n’est pas nécessaire de mener une conduite du changement. C’est un gain de productivité facile et rapide à mettre en place. »
Réinventer certains process
Dans certains cas, c’est une réécriture totale des métiers qui est en jeu. Hanan Ouazan prend l’exemple des centres de contacts : « Ils peuvent être remplacés par des chatbots performants, permettant d’assister les agents humains et ainsi améliorer leur performance de 30 à 50%. »
En bouleversant la manière de travailler, l’IA générative implique de repenser certaines fonctions. « Lorsque le gain est très important et que la technologie est facile à prendre en main, alors on peut se permettre de chambouler les usages. Avec un temps d’adaptation et de formation, il est possible d’en tirer profit à 100%. »
Élargir ses opportunités
Avec l’évolution des méthodes de travail, l’IA générative peut créer de nouveaux métiers, de nouveaux produits ou de nouvelles fonctionnalités. Pour Hanan Ouazan, c’est un multiplicateur d’opportunités : « Les entreprises de recherche dans le milieu médical, pharmaceutique ou encore technologique peuvent accélérer leurs découvertes grâce à l’IA qui va plus facilement effectuer des recherches et retrouver des liens. Les entreprises peuvent alors accélérer leur processus de développement et ainsi dégager plus de temps pour la phase de tests. »
Pour les secteurs de la communication et du marketing, l’IA générative offre de nombreuses possibilités : génération d’images, de vidéos, rédaction… Avec une création de contenu plus simple et rapide, les petites entreprises peuvent améliorer leur visibilité et créer une communication adaptée à leurs différentes cibles.
Pour l’expert, plus les entreprises vont réussir à intégrer l’intelligence artificielle dans leurs pratiques, plus elles seront gagnantes. « C’est un sujet qu’il ne faut pas négliger puisqu’il touche toutes les fonctions et tous les secteurs. Il faut d’ores et déjà à minima s’intéresser à l’impact que cela va avoir dans son business. »
Intégrer l’IA générative dans son entreprise : quels risques ?
Avant de se lancer dans l’utilisation de plusieurs outils d’IA générative, Hanan Ouazan recommande aux entreprises de faire preuve de pragmatisme et de se poser les bonnes questions : « On ne peut pas bouleverser les habitudes de nos collaborateurs si nous ne sommes pas sûrs des gains que ces changements vont apporter à l’équipe ». Il recommande de réaliser une phase de test permettant de quantifier les bénéfices et d’obtenir un retour d’expérience des collaborateurs. De mauvais résultats peuvent signifier un manque de maturité de l’outil ou de préparation du côté de l’équipe : « Dans tous les cas, il n’y a pas de mal à faire demi-tour pour trouver l’outil adapté à votre business. »
Avec un coût pouvant être élevé pour les plus petites entreprises (entre 20 et 30 euros par mois et par utilisateur), les outils d’IA générative doivent être une aide efficace et rentable. Pour le vérifier, les entreprises doivent résister à la tentation de multiplier les outils pour se concentrer sur une technologie spécifique. Pour débuter, les fonctions transverses telles que la comptabilité, la finance ou encore les ressources humaines sont des espaces de test intéressants : « Quel que soit le secteur d’activité de votre entreprise, ces métiers utilisent des outils de bureautiques qui n’ont pas forcément évolué depuis plusieurs années. L’IA peut leur apporter un nouveau souffle » explique l’associé d’Artefact.
Autre risque à prendre en compte, la fiabilité des outils. Certaines fonctionnalités pâtissent encore d’erreurs, avec des cas « d’hallucinations » spécifiques à l’utilisation de l’intelligence artificielle. En s’appuyant sur des données existantes plutôt que sur une compréhension de l’exactitude des faits, l’IA peut alors générer des réponses incorrectes ou trompeuses. Des failles de sécurité peuvent également avoir lieu, incluant une fuite de données personnelles entrainant des risques juridiques. Avant de mettre en place une technologie à l’échelle d’une entreprise, il est nécessaire d’identifier les facteurs de risque afin d’éviter une mauvaise presse.
Enfin, la question juridique est, elle aussi, au cœur du sujet : « Les limites ne sont pas encore très claires, mais la production d’images ou de vidéos par l’IA générative pose la question de la propriété intellectuelle. L’IA Act viendra prochainement apporter des réponses à ces interrogations. »