Une entreprise individuelle peut être transformée en société par le biais d'une cession de fonds de commerce, par un apport de fonds de commerce ou encore par le mécanisme de la location gérance.
Les éléments du fonds de commerce comprennent un ensemble de biens meubles, corporels ou incorporels, affectés à l'exploitation d'une activité commerciale.
Les premiers sont le matériel, l'outillage et les marchandises.
Parmi les seconds, on distingue :
- les biens meubles incorporels ordinaires : la clientèle (élément essentiel et indispensable sans lequel aucune de cession de fonds de commerce ne peut avor lieu), le droit au bail, le nom ou l'enseigne commerciale ;
- les biens meubles incorporels extraordinaires : les droits de propriété industrielle (brevets, marques, dessins et modèles), les droits de propriété littéraire et artistique, etc.
L'exploitation du fonds de commerce pourra être transmise à la société suivant l'une des trois modalités suivantes :
- la cession ;
- l'apport au capital ;
- la location gérance.
Le choix se fera en fonction du régime fiscal le plus favorable au regard de la situation personnelle de l'entrepreneur individuel.
Attention, certains contrats (notamment franchise et distribution exclusive) ne peuvent êtr transmis à la société qu'avec l'accord préalable du cocontractant qui peut agréer ou refuser d'agréer la société.
Transformation par cession du fonds de commerce
Régime juridique
Le commerçant cède son fonds de commerce à une société dans laquelle il aura nécessairement la qualité d'associé. Cette cession doit respecter les mêmes obligations et formalités que celles exigées pour une cession à un tiers (articles L. 141-1 et suivants du Code de commerce).
Régime comptable
Généralement, le prix du fonds n'est pas payé immédiatement. La créance du vendeur est alors inscrite à son nom dans la comptabilité de la société, sous la forme d'un compte courant (l'exploitant étant désormais associé).
Dans le bilan de la société en début d'activité, la valeur du fonds de commerce est inscrite à l'actif dans la catégorie des immobilisations et, en contrepartie, le compte courant de l'ancien exploitant est porté au passif.
Régime fiscal
Imposition du cédant
La cession du fonds de commerce entraînant sa cessation d'activité, le commerçant devra donc déclarer et payer les impôts relatifs à son exploitation antérieure.
Il s'agit principalement du bénéfice non encore imposé et d'un impôt sur la plus-value du fonds de commerce, calculé sur la différence entre la valeur d'acquisition (ou de création) et la valeur de cession du fonds.
En fonction de la durée de détention ou de la date de création du fonds de commerce, cette plus-value est soit soumise à l'impôt sur le revenu en tant que bénéfice d'exploitation (selon le mécanisme du régime des plus-values à court terme) soit taxée à un taux de 30 % (12,8 % de plus-values et 17,2 % de contributions sociales) pour les plus-values à long terme.
Cependant, le cédant dont le chiffre d'affaires n'excède pas certaines limites peut bénéficier d'un régime d'exonération des plus-values dont les modalités et conditions sont exposées dans la fiche "exonération des plus-values des petites entreprises".
En outre, sous certaines conditions les plus-values de cessions de fonds de commerce sont exonérées en totalité d'impôt. Par exemple, lorsque la valeur des éléments du fonds soumis aux droits d'enregistrement n'excède pas 300.000 €. Une exonération partielle de la plus-value est accordée lorsque la valeur du fonds est comprise entre 300.000 et 500.000 euros.
Imposition du cessionnaire
En qualité d'acquéreur du fonds de commerce, la société devra acquitter des droits d'enregistrement calculés sur la valeur du fonds de commerce :
- pour la fraction inférieure à 23.000 euros : 0 euros (droit fixe minimum de 25 euros) ;
- pour la fraction comprise entre 23.000 euros et 200.000 euros : 3 % ;
- pour la fraction supérieure à 200.000 euros : 5 %.
Transformation par apport du fonds de commerce au capital social
Régime juridique
Le fonds de commerce est transféré en pleine propriété dans le cadre d'un apport en nature au capital de la société.
L'exploitant du fonds de commerce reçoit en contrepartie de son apport des titres de la société.
L'opération devra respecter un certain nombre de dispositions légales visant à protéger les droits des éventuels créanciers de l'entrepreneur (articles L. 141-1 et suivants du Code de commerce).
Régime comptable
Dans le bilan du début d'activité de la société, la valeur du fonds est comptabilisée dans le compte capital situé au passif et en contrepartie, une immobilisation est inscrite à l'actif du bilan.
Selon la forme de la société et si certaines conditions sont réunies, il peut être obligatoire de faire estimer la valeur du fonds par un commissaire aux apports.
Régime fiscal
Imposition de l'apporteur
Il est soumis à toutes les impositions relatives à une cessation d'activité.
Cependant, l'apporteur peut opter pour le régime de l'article 151 octies du Code général des impôts, qui lui permet d'éviter l'imposition immédiate des plus-values et profits sur stocks dégagés lors de la cessation de l'activité individuelle.
Ce régime se caractérise par :
- le report de la taxation de la plus-value sur les éléments non amortissables (la clientèle, par exemple) au jour de la cession à titre onéreux des droits sociaux, du rachat de ces droits par la société ou au jour de la cession par cette dernière du bien apporté. Ce report est maintenu en cas de transmission ultérieure à titre gratuit des droits sociaux, dès lors que le bénéficiaire de cette transmission prend l'engagement d'acquitter l'impôt sur les plus-values ;
- l'étalement sur cinq ans du paiement de la plus-value sur les éléments amortissables (comme le matériel). Ces plus-values sont réintégrées dans les résultats de la société bénéficiaire des apports et ne sont donc pas imposées au nom de l'apporteur des immobilisations.
Pour les opérations réalisées depuis le 1er janvier 2006, l'option pour le régime de l'article 151 octies du CGI n'est pas cumulable avec les régimes d'exonération des plus-values des petites entreprises d'une part et des plus-values de cession d'une entreprise individuelle ou d'une branche complète d'activité d'autre part.
Attention : l'option pour l'article 151 octies du CGI doit être pris dans l'acte de cession. Par ailleurs, un état de suivi des plus-values en report d'imposition doit être déposé régulièrement auprès de l'administration fiscale.
Imposition de la société bénéficiaire de l'apport
Elle doit en principe acquitter des droits d'enregistrement calculés sur la valeur du fonds de commerce, au même taux qu'en matière de vente, c'est-à-dire 3 % pour une valeur comprise entre 23.000 euros et 200.000 euros et 5 % pour une valeur supérieure à 200.000 euros.
Cependant, si l'exploitant, exerçant en société et soumis à l'impôt des sociétés, prend, au moment de l'enregistrement, l'engagement de conserver les titres reçus en contrepartie de son apport pendant trois ans, la société en sera exonérée.
Pour les personnes exploitant leur activité à l'impôt sur le revenu, elles sont exonérées de droit fixe.
Transformation par location gérance
Conditions de la location gérance
La loi n°2019-7444 a supprimé l'obligation de justifier de deux ans d'exploitation du fonds de commerce pour le mettre en location gérance. Par contre le propriétaire du fonds de commerce devra faire attention à son contrat de bail commercial qui peut par une clause expresse lui interdire de mettre son fonds de commerce en location gérance.
Régime juridique
La location-gérance est régie par les articles L. 144-1 et suivants du Code de commerce.
Cette opération permet à l'ancien exploitant de garder la propriété de son fonds de commerce tout en confiant l'exploitation à la société qui verse, en contrepartie, une redevance.
Il peut être associé et/ou gérant de la société exploitant le fonds.
Régime comptable
La société n'étant pas propriétaire du fonds de commerce qu'elle exploite, celui-ci n'est pas inscrit à l'actif du bilan de la société.
Seule la redevance payée au propriétaire du fonds est traitée comme une charge d'exploitation, et figure à ce titre au compte de résultat.
Régime fiscal
La mise en location gérance du fonds de commerce présente un double avantage : aucun droit d'enregistrement n'est dû et il n'y a pas de plus-value imposable.
En effet, l'opération s'analyse ni comme une vente ni comme un apport du fonds de commerce, mais seulement comme une location de ce dernier.
Obligations sociales du propriétaire du fonds
Le propriétaire du fonds de commerce est redevable de toutes les cotisations obligatoires, de la CSG et de la CRDS sur les revenus tirés de la location gérance lorsque ces revenus sont perçus alors qu'il effectue des actes de commerce ou exerce une activité professionnelle au sein de la société exploitant le fonds.