Incompatibilité et interdiction de gérer
Fiche pratique
INFOREG

Certaines personnes ne peuvent pas gérer de sociétés commerciales. En effet, leur profession ou une condamnation judiciaire peuvent constituer un obstacle à l’exercice d’un mandat social dans une société commerciale.

Incompatibilité

L'exercice de certaines professions ou de certains mandats est incompatible avec des fonctions de direction. Ces incompatibilités résultent généralement de règles déontologiques. Elles n'entraînent pas, à elles seules, l'annulation des actes accomplis par le dirigeant.

Avocat

L'exercice de la profession d'avocat est incompatible avec les fonctions de gérant d'une société à responsabilité limitée (SARL), de président du conseil d'administration, de membre du directoire ou de directeur général d'une société anonyme (SA), sauf si la société a pour objet la gestion d'intérêts familiaux ou professionnels.

 

Un avocat peut, toutefois, être membre d'un conseil d'administration ou de surveillance s'il justifie d'une ancienneté de sept années d'exercice. Le conseil de l'ordre peut le dispenser d'une partie de ces années d'exercice.
Loi n° 71-1130 du 31/12/1971 et Décret n° 91-1197 du 27/11/1991.

 

L'objectif de la réglementation étant de préserver l'indépendance de l'avocat, l'exercice de cette profession semble également incompatible avec les fonctions de dirigeant de toute autre société commerciale. Ainsi, la profession d'avocat parait incompatible avec les fonctions de président, directeur général ou autre d'une société par actions simplifiée (SAS) ou encore de gérant d'une société en nom collectif (SNC).

 

Depuis le 1 er juillet 2016, l'article 4 du décret n°2016-882 prévoit que les avocats sont autorisés à exercer une activité commerciale à titre accessoire. Sont ainsi autorisés l'édition juridique, la formation professionnelle ou encore la mise à disposition de moyens matériels ou de locaux au bénéfice d'autres avocat. Pour ce faire, ils doivent en informer par écrit le conseil du barreau de l'ordre des avocats.

Commissaire aux comptes

La fonction de commissaire aux comptes est incompatible avec :

  • toute activité ou tout acte qui n'est pas de nature à porter atteinte à son indépendance ;
  • tout emploi salarié ;
  • toute activité commerciale qu'elle soit exercée directement ou par personne interposée.

Le fait d'être associé, dirigeant ou mandataire social d'une société, même si elle exerce une activité commerciale, n'est pas en soi incompatible avec les fonctions de commissaire aux comptes.

 

En revanche, le commissaire aux comptes doit être indépendant de la société dont il est appelé à certifier les comptes. Il ne pourra donc exercer les fonctions de dirigeant au sein des entités qui contrôlent cette société ou qui sont contrôlées par elle. Cette incompatibilité tombe cinq ans après l'expiration des fonctions de commissaire aux comptes.

 

Il existe également des incompatibilités en raison des liens personnels, financiers ou professionnels (art L. 822-11 , 1 al 2) concomitants ou antérieurs à la mission du commissaire aux comptes.

Expert-comptable

Depuis la loi n°2010-853 du 23 juillet 2010 relative aux réseaux consulaires, au commerce, à l'artisanat et aux services, les experts-comptables ont la possibilité d'accepter, sous le contrôle du conseil régional dont ils relèvent et dans les conditions fixées par le règlement intérieur de l'ordre des experts-comptables, tout mandat social dans toute société dès lors que ce mandat n'est pas de nature à porter atteinte à leur indépendance.

Fonctionnaire

Principe

La loi n°2016-483 du 20 avril 2016 ainsi que le décret du 27 janvier  2017 est venu préciser les conditions du cumul autorisé pour un agent de la fonction publique.

 

Le fonctionnaire peut être autorisé à cumuler ses fonctions publiques avec une activité privée, s'il  respecte les trois conditions suivantes :

  1. il ne doit pas se trouver dans une situation de conflit d'intérêt ;
  2. il doit éviter de traiter tout dossier de son administration en lien avec l'activité privée;
  3. il doit en informer préalablement son administration.

Par ailleurs, le fonctionnaire doit demander une autorisation de cumul préalblement à l'exercice de son activité privée. L'autorité hiérarchique doit être en capacité d'examiner précisément le type d'activité envisagée et sa compatibilité avec les principes déontologiques et les fonctions réellement exercées par l'agent.

Cas des anciens fonctionnaires

Avant l'expiration d'un délai de trois ans à compter de la cessation de ses fonctions, un ancien fonctionnaire ne peut pas être dirigeant au sein d'une société qu'il contrôlait ou surveillait de par ses fonctions.
Décret n°2007-611 du 26 avril 2007.

 

En cas de non-respect de cette interdiction, le fonctionnaire s'expose à deux ans de prison et 200 000 € d'amende.
Article 432-13 du Code pénal.

Notaire

Par principe, il est interdit à un notaire de s'immiscer, directement ou indirectement, dans l'administration d'une société commerciale.
Décret n°45-0117 du 19/12/1945 modifié par le décret n°64-742 du 20/07/1964, article 13.

 

Cependant, il peut être membre du conseil d'administration ou de surveillance d'une société par actions, sous réserve qu'il ne reçoive pas les actes de cette société.
Décret n° 86-728 du 29/04/1986

 

En cas d'exercice d'un mandat social, le notaire doit informer le procureur de la République et le président de la Chambre des notaires dans les quinze jours suivant sa nomination. Il doit joindre à sa déclaration :

  • un exemplaire des statuts de la société ;
  • une copie du dernier bilan de la société lorsque cette dernière a, au moins, un an d'existence.

Remarque : Des incompatibilités existent également pour les membres d'une entreprise d'investissement (article R. 533-10 du Code monétaire et financier) ainsi que pour les membres du Gouvernement ou du Parlement.
Articles LO 145, 146 et 147 et LO 297 du Code électoral.

Interdiction

loi de modernisation de l'économie

Le régime d'incapacité qui interdisait, de plein droit, à certaines personnes condamnées définitivement pour crime ou certains délits (escroquerie, abus de confiance, recel, etc.) de diriger, d'administrer, de gérer ou de contrôler une entreprise commerciale ou industrielle a été abrogé par la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie (LME).

 

Désormais, la peine automatique est remplacée par une peine complémentaire qui doit être expressément prononcée par le juge dès lors que la personne en cause est reconnue coupable d'une des infractions (crime ou délit) limitativement énumérées par la loi.

Infractions susceptibles d'entraîner une peine complémentaire

Il s'agit des infractions énumérées aux articles 70 à 73 de la LME relevant essentiellement :

  • du Code pénal ; elles visent notamment le crime, le vol, l'extorsion, l'escroquerie, le blanchiment, le détournement, le recel, le faux et l'usage de faux, la corruption, etc ;
  • du Code de commerce : elles visent les délits relatifs aux sociétés commerciales (abus de biens sociaux, présentation de comptes infidèles, défaut d'établissement des comptes annuels, défaut de convocation de l'assemblée annuelle dans les délais, etc.) et le délit de banqueroute articles L. 249-1 et L. 654-5 du Code de commerce ;
  • du Code de la consommation : elles visent les appellations d'origine contrôlée, le démarchage, l'abus de faiblesse, les fraudes et falsifications dangereuses ou nuisibles pour la santé de l'homme ou de l'animal, la conformité et la sécurité des produits et services et les prêts usuraires ;
  • de la réglementation en matière de loterie, jeux de hasard et casinos ;
  • du Code général des impôts (fraude fiscale) ;
  • du Code du travail (travail dissimulé).

Nature et durée de la peine complémentaire

Nature de la peine complémentaire

Pour de nombreuses infractions pénales de droit commun (escroquerie, vol...), les tribunaux peuvent prononcer une interdiction d'exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d'administrer, de gérer ou de contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour son propre compte ou pour le compte d'autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale.

 

Le Code de commerce prévoit la même disposition pour les personnes physiques condamnées pour des infractions au droit des sociétés (abus de biens sociaux, distribution de dividendes fictifs, présentation de comptes infidèles...).

 

Cela signifie qu'une personne condamnée à une telle interdiction ne pourra ni être entrepreneur individuel ni dirigeant d'une entreprise commerciale.

 

Autrement dit, elle pourra uniquement être associée d'une SARL ou actionnaire d'une SA sans y exercer la fonction de direction telle que gérant, administrateur, directeur général, président du conseil d'administration...

Durée de la peine complémentaire

L'interdiction peut être :

  • définitive ou ;
  • temporaire ; dans ce cas, elle ne peut excéder dix ans. article 131-27 du Code pénal.

Sanction du non-respect de l'interdiction d'exercer

Toute violation de l'interdiction d'exercer une activité professionnelle ou sociale est punie de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende.
Article 434-40 du Code pénal.

Faillite personnelle et interdiction de gérer

Lorsqu'une société est mise en redressement ou liquidation judiciaire, son dirigeant peut être frappé d'une sanction qui lui est propre : la faillite personnelle.

 

Cette mesure entraîne de nombreuses déchéances et interdictions dont l'interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole ou toute entreprise ayant toute autre activité indépendante.
Article L. 653-2 du Code de commerce.

 

Lorsque le tribunal prononce cette interdiction, elle ne peut excéder quinze ans.
Article L. 653-11 du Code de commerce.

 

La violation de cette déchéance est sanctionnée par deux ans d'emprisonnement et 375.000 € d'amende.
Article L.654-15 du Code de commerce.

 

Remarque : quelle que soit leur origine, les mesures d'incapacité ou d'interdiction d'exercer une activité commerciale ou professionnelle, de gérer, d'administrer ou de diriger une personne morale sont mentionnées d'office au Registre du Commerce et des Sociétés.

Levée des interdictions et déchéances professionnelles

Avant la LME, certaines condamnations pénales emportaient de plein droit une interdiction professionnelle. Le juge a la possibilité de relever le condamné, en tout ou partie, de cette déchéance automatique.
articles 132-21 du Code pénal et 702-1 du Code de procédure pénale.

 

L'intéressé peut demander, à tout moment, la levée des incapacités professionnelles à la juridiction qui l'a condamné.

 

Dans le cas de la faillite personnelle, une personne ayant fait l'objet d'une interdiction de gérer peut saisir le tribunal pour qu'il relève la peine, à condition qu'il ait apporté une contribution suffisante au paiement du passif.
Article L. 653-11 du Code de commerce.

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Mis à jour le 08/11/2019