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La loi n° 2023-221 du 30 mars 2023 tendant à renforcer l'équilibre dans les relations commerciales entre fournisseurs et distributeurs est applicable depuis le 1er avril 2023.
Cette loi vise avant tout à sécuriser l'approvisionnement des français en produits alimentaires et de grande consommation en rééquilibrant le rapport de force existant dans ce secteur entre fournisseurs et distributeurs.
Faisons le point sur l’impact de ces nouvelles mesures sur les négociations et la conclusion de la convention entre fournisseurs et distributeurs.
Qui est concerné ?
Cette nouvelle législation concerne tout fournisseur et distributeur de produits ou services en France et plus spécifiquement les fournisseurs-industriels de l’agroalimentaire et les distributeurs de la grande distribution.
Quelles sont les nouvelles mesures d’ordre général ?
Soumission au droit français et aux tribunaux français
Dorénavant, tout accord relatif à la vente de produit ou service en France est soumis au droit et aux tribunaux français. (C. com. art. L 444-1 A nouveau ; Loi art. 1).
Encadrement des pénalités logistiques
Clause relative aux pénalités logistiques dans la convention logistique
Désormais, le distributeur et le fournisseur ont l’obligation de formaliser une convention logistique écrite distincte de la convention unique fixant les obligations générales des parties (C. com. art. L 441-3, I bis nouveau ; Loi art. 11).
La négociation de la convention logistique peut se faire à tout moment de l’année.
La convention logistique doit notamment déterminer le montant des pénalités et les modalités de détermination de ce montant en cas de retard ou d’absence de livraison (C.
com. art. L 441-3, I bis nouveau ; Loi art. 11).
Le distributeur ne peut plus appliquer de pénalités lorsqu’une période de plus d’un an se sera écoulée depuis le manquement du fournisseur (C. com. art. L 441-17, I-al. 3 nouveau).
Détermination du montant des pénalités logistiques
Le montant des pénalités logistique doit :
- être proportionné au préjudice subi,
- être plafonné à 2% de la valeur des produits commandés relevant de catégorie de produits au sein de laquelle le manquement du fournisseur a été constaté (C. com. art. L 441-17, Ial. 2 modifié ; Loi art. 12, 1).
Communication à la Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF)
Au plus tard le 31 décembre de chaque année, les distributeurs devront :
- communiquer à la DGCCRF les montants des pénalités logistiques appliquées durant l’année écoulée à leurs fournisseurs, détaillés mois par mois,
- communiquer à la DGCCRF les montants de pénalités logistiques réellement perçus, détaillés mois par mois (C. com. art. L 441-19, al. 2 s. nouveaux ; Loi art. 14).
Au 31 décembre 2023, les distributeurs devront communiqués les montants appliqués en 2021 et 2022.
Le non-respect de cette obligation de communication est sanctionné par une amende maximale de 150 000 € pour une personne morale et 300 000 euros en cas de réitération (C. com. art. L 441-19, dernier al. nouveau).
Avis de pénalité logistique
Le distributeur qui transmet au fournisseur un avis de pénalité logistique, doit apporter en même temps et par tout moyen, la preuve du manquement constaté et du préjudice subi (C. com. art. L 441-17, I-al. 4 modifié).
Règles de détermination du prix pendant le préavis de rupture
Pour déterminer le prix applicable pendant la durée du préavis précédent la rupture de la relation commerciale, les parties doivent tenir compte des conditions économiques du marché sur lequel elles opèrent (art. L 442-1, II-al. 1 modifié ; Loi art. 9, I-3o-1).
Les conditions économiques du marché peuvent concerner par exemple :
- un taux d’inflation des produits ou des intrants nécessaires à leur fabrication ;
- la hausse moyenne de tarif acceptée par les distributeurs concurrents ayant trouvé un accord avec le même fournisseur au 1er mars.
Le non-respect de cette nouvelle condition entrainera la responsabilité de son auteur pour rupture brutale de la relation commerciale, et ce même si la durée du préavis était suffisante.
Règles encadrant l’absence de convention unique au 1er mars
Pour rappel, les négociations relatives à la convention unique encadrant la relation commerciale entre fournisseurs et distributeurs ont lieu chaque année du 1er décembre au 1er mars.
Les produits ou services soumis à un cycle de commercialisation particulier en raison de leur saisonnalité, ne sont pas soumis à la date butoir du 1er mars.
Désormais, en cas d'absence d'accord au 1er mars, trois possibilités s’offrent aux parties :
- le fournisseur peut décider de mettre fin à la relation avec le distributeur (Loi Egalim 3 art. 9, II),
- le fournisseur peut demander l’application d’un préavis de rupture (Loi Egalim 3 art. 9, II),
- les parties choisissent de recourir, avant le 1er avril, au médiateur des relations commerciales agricoles ou au médiateur des entreprises, afin de trouver un accord fixant les conditions du préavis de rupture (Loi Egalim 3 art. 9, II) :
> En cas d’accord entre les parties suite à la médiation, le prix fixé pour la durée du préavis s’applique rétroactivement aux commandes passées depuis le 1er mars,
> En cas de désaccord suite à la médiation, le fournisseur retrouve sa faculté de rompre la relation commerciale ou bien de demander l’application d’un préavis de rupture.
Quelles sont les mesures prises spécialement pour les produits de grande consommation ?
Mentions obligatoires dans la convention portant sur les PGC
La convention portant sur les PGC doit mentionner :
- les obligations réciproques auxquelles se sont engagées les parties à l’issue de la négociation commerciale et qui concourent à la détermination du prix convenu (C. com. art. L 441-3, I-al. 1 sur renvoi de l’art. L 441-4, I),
- le prix unitaire de chaque obligation réciproques (C. com. art. L 441-4, III modifié ; Loi art. 3).
Interdiction des pratiques discriminatoires
La vente de PGC est maintenant soumise à l’interdiction des pratiques discriminatoires. Autrement dit, le fournisseur de produits PGC doit accorder les mêmes conditions à des clients placés dans des situations identiques ou fortement similaires (C. com. art. L 442-1, I-4 modifié ; Loi art. 4).
Le non-respect de cette interdiction entraîne la responsabilité civile extracontractuelle de son auteur (C. com. art. L 442-1, I-1).
Sanction en cas de mauvaise foi dans les négociations
Le non conclusion de la convention au 1er mars due à l’absence de bonne foi dans le cadre des négociations par l’une des parties, engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé (C. com. art. L 442-1, I-5 nouveau ; Loi art. 9, 2).
Sanction en cas de non-respect de la date butoir du 1er mars
En cas de non-respect de l’échéance du 1er mars pour la conclusion de la convention relative aux PGC, la sanction administrative s’élève désormais à 200 000 € pour une personne physique et 1 M€ pour une personne morale (C. com. art. L 441-6, al. 3 nouveau ; Loi art. 10).
Encadrement des promotions
A compter du 1er mars 2024 et jusqu’au 15 avril 2026, les PGC seront également soumis à l’encadrement des promotions, dans les grandes surfaces à 34% de leur valeur et 25% en volume (Loi 2020-1525 du 7-12-2020 art. 125 modifié ; Loi art. 7).
Quelles sont les mesures spécifiques pour les produits alimentaires ?
Prorogation du relèvement du seuil de revente à perte et produits exclus
Jusqu’au 15 avril 2025, le relèvement du seuil de revente à perte pour les produits alimentaires est fixé à 10% (Loi 2020-1525 du 7-12-2020 art. 125, VIII modifié ; Loi art. 2, 4).
Les fruits et légumes frais ne sont pas concernés par cette mesure sauf décision du ministre de l’agriculture.Avant le 1er septembre de chaque année, chaque distributeur de PGC doit dorénavant transmettre aux ministres de l’Economie et de l’Agriculture, un document indiquant
comment la mesure de relèvement du seuil de revente à perte aura bénéficié aux fournisseurs (Loi 2020-1525 art. 125, IV bis nouveau ; Loi art. 2, 3).
Prorogation de l’encadrement des promotions
L’encadrement des avantages promotionnels en valeur et en volume est prolongé jusqu’au 15 avril 2026 pour les produits alimentaires (Loi 2020-1525 art. 125, II modifié ; Loi art. 2, 4).
Attestation du tiers indépendant (C. com. art. L 441-1-1, I3 modifié ; Loi art. 15)
Pour répondre à son obligation de transparence sur ses prix, le fournisseur a plusieurs options dont l’une lui permet de faire intervenir, à ses frais, un commissaire aux comptes chargé :
- d’attester, dans le mois qui suit l'envoi des conditions générales de vente (CGV) au distributeur, que l’évolution du tarif du fournisseur ne résulte pas de celle du prix des matières premières agricoles ou des produits transformés composé de plus de 50% de matières agricoles (produits transformés). Pour cela, le commissaire aux comptes devra recevoir l’ensemble des pièces nécessaires et notamment la méthodologie employée pour déterminer l'impact sur le tarif de l'évolution du prix desdites matières premières agricoles ou desdits produits transformés. L’absence d’attestation dans les délais oblige les parties à modifier leur contrat dans les deux mois suivant sa signature.
- d’attester, au terme de la négociation du contrat avec le distributeur, que celle-ci n’a pas porté sur la part d’évolution du tarif résultant de l’évolution du prix des matières premières agricoles ou des produits transformés.
Clause automatique de révision des prix dans la convention unique
La clause de révision automatique des prix doit prendre en compte « l’ensemble des coûts des matières premières agricoles » (C. com. art. L 443-8, IV modifié ; Loi art. 17).
Les évolutions de prix résultant de la mise en œuvre de la clause de révision automatique des prix devront être appliquées au plus tard un mois après le déclenchement de cette clause (C. com. art. L 443-8, IV modifié ; Loi art. 17).
Contrats de fabrication de produits alimentaires à marque de distributeur (produits MDD)
La négociation comme la renégociation du prix dans les contrats relatifs à la vente de produits MDD, ne doit pas porter sur la part des matières premières agricoles et des produits transformés dans le prix des produits proposés au distributeur (C. com. art. L 441-7, I-al. 2 modifié).
Lorsque le contrat porte sur une période supérieure à un an, ce dernier doit prévoir une renégociation annuelle obligatoire du prix afin de tenir compte des fluctuations des prix des matières premières entrant dans la composition du produit (C. com. art. L 441-7, I bis A nouveau).
Exemption d’obligation d’information dans les contrats de vente à terme de produits agricoles
Dans le cadre des contrats de vente à terme de produits agricoles ne comportant pas de prix déterminés, l’acheteur n’est pas soumis à l’obligation de communiquer au producteur avant le premier jour de la livraison, le prix qui sera à payer pour les produits objets du contrat (C. rur. art. L 631-24,VIII modifié).
Dans le cadre de la loi dite "EGalim" (loi n°2018-938 du 30 octobre 2018), la loi n° 2020-699 relative à la transparence de l'information sur les produits agricoles et alimentaires vient compléter et renforcer les dispositions relatives à l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires.