D’abord repreneur physique puis repreneur personne morale et enfin cédant, Gabriel Strauss raconte son riche parcours entrepreneurial. Il évoque les obstacles rencontrés et les enseignements tirés.
Après 25 ans passés dans des postes de direction de l’industrie pharmaceutique et de la santé en France et à l’étranger, Damien de Charry a choisi un virage audacieux en reprenant en 2023 Novex, acteur reconnu en France de la vente d’accessoires de beauté. Entre questionnements et détermination, il revient sur son expérience.
« Je suis d’abord un homme, un mari, un père de famille », ainsi se décrit Damien de Charry. Son soutien familial est une source de force et d’équilibre, un ancrage essentiel qui nourrit sa détermination et sa vision de repreneur.
Après une carrière internationale, notamment en Russie où il occupait la fonction de directeur financier, il s’immerge dans des postes plus opérationnels pour diriger ensuite une unité commerciale d’un groupe pharmaceutique. Mais, peu à peu, sa motivation s’émousse ; agacé par des alignements de valeurs divergents, il questionne le sens de son travail.
Sa rupture professionnelle abrupte en 2019 agit comme un catalyseur. Il rejoint alors l’association AVARAP qui accompagne les personnes à redéfinir leur avenir professionnel. Lors de ce bilan, il constate qu’il n’a plus envie de naviguer avec les injonctions contradictoires qui lui sont proposées en permanence : « Les grands groupes, je ne sais pas si j’en ai fait le tour, mais j’ai fait mon tour ». Inspiré par son environnement familial, en partie entrepreneur, conforté par son bilan et soutenu par ses proches, il voit la reprise d’entreprise comme une option viable.
Les étapes clés d’une reprise d’entreprise réussie
À la suite de ce bilan, Damien de Charry décide de suivre "5 jours pour reprendre", la formation de la CCI Paris Île-de-France. La petite graine de l’entrepreneuriat ne demande qu’à germer, mais Damien de Charry module : « c’était encore un peu tôt ; je n’étais pas totalement prêt à actionner tous les leviers, de la recherche d’une entreprise au financement ». Il reprend alors un poste de directeur marketing dans la santé animale. Un an et demi plus tard il décide définitivement de se consacrer à la reprise d’entreprise, aidé par une nouvelle formation.
La réussite d’une reprise repose sur une approche méthodique, acquise notamment dans les formations dédiées au rachat d’entreprise. Mais avant de poursuivre son argumentation, Damien de Charry souligne l’importance de s’assurer du soutien familial et de la compréhension des risques pris : « Il ne faut pas que la famille s’interroge sur le bien-fondé d’une telle décision. Moi, j’ai la chance de bénéficier du soutien indéfectible de mon épouse et de mes enfants ».
Pour commencer, en suivant les recommandations des formations suivies, il réalise une cartographie de l’entreprise idéale. Cette première étape cadre le projet avec une vision claire et précise qui englobe aussi bien le secteur d’activité, le type d’activité, la taille d’entreprise souhaitée et sa localisation. Avec une solide expérience dans le secteur de la santé, Damien de Charry cherche avant tout une entreprise dans le domaine de la santé ou du bien-être. Un spectre assez large qui lui permet d’accéder à des dossiers variés, de la cosmétique au sport, avant de reprendre Novex.
Dossiers sélectionnés en main, le deuxième point que révèle Damien de Charry est l’importance de l’échange avec le cédant, la capacité à créer un lien de confiance. « Le fit avec le cédant conditionne toute la suite » avance-t-il. Une étape incontournable de diagnostics et d’évaluations pour s’assurer de l’alignement des valeurs et des objectifs pour garantir, si la négociation aboutit, un passage de relais réussi auprès des équipes.
Troisième point charnière, c’est la lettre d’intention (LOI). « Un document qui mobilise énormément de travail et d’investissement, mais c’est autour de cette LOI que s’engage vraiment la discussion ». Ce document formalise le cadre de la négociation, exprime les intentions des parties pour aboutir au contrat final. Cette lettre permet l’accès aux informations confidentielles et parfois de “lever quelques lièvres” qui peuvent stopper la négociation. Il faut avoir une bonne dose de persévérance et savoir rebondir. Damien de Charry confirme : « Jusqu’à Novex, j’ai rédigé au total cinq lettres d’intention. Il ne faut pas mettre tous les œufs dans le même panier, car tant que rien n’est signé, tout peut retomber ».
Dernier point qui a marqué Damien de Charry dans ce parcours de repreneur, c’est la période du montage financier : « Ce qui est passionnant dans la reprise, c’est la liberté de choisir son montage financier. Des fonds propres, certes, mais j’ai fait appel au cédant pour financer une partie du rachat ». C’est une partie un peu technique et plusieurs modes de financement coexistent. Il est possible de faire appel à des banques, à des fonds financiers ou encore à des business Angels. Chaque montage financier doit s’adapter au projet et à la manière dont le repreneur souhaite travailler avec ses partenaires financiers.
Les trois qualités essentielles d’un bon repreneur
Le goût du risque.
Lorsque l’on demande à Damien de Charry quelles sont les qualités essentielles d’un bon repreneur, il répond spontanément « Il faut avoir le goût du risque, être prêt à prendre des décisions sans pour autant avoir toutes les informations ».
La conviction chevillée au corps.
Après le goût du risque, il place la conviction et l’endurance. « Il y a des moments de déception, mais aussi des moments de réalisations personnelles incroyables ». Les formations suivies ont pour lui été essentielles pour effectuer un travail sur soi, savoir reconnaître les moments clés et oser solliciter les conseils d’experts au moment opportun. Bénéficier de ces soutiens permet de prendre de la hauteur, de garder le cap et de rester focus sur ses objectifs.
L’écoute et un management humain.
L’écoute préalable du cédant permet de décrypter un ensemble de signaux qui facilite l’intégration lors du passage à témoins. Damien de Charry savait qu’il bénéficiait du regard bienveillant du cédant, convaincu du bienfondé du choix de son successeur. À son arrivée chez Novex, il prend le temps de rencontrer individuellement chaque salarié. « Je suis coach d’une équipe de rugby. Il y a des éléments très similaires : travail, transparence, clarté et exemplarité ». Un temps fort pour exposer sa vision et apaiser les craintes éventuelles. Dans cette période, il est nécessaire de donner à chacun de la perspective dans le plan de pérennisation de l’entreprise. La reprise, c’est une aventure humaine avant tout.
Pour Damien de Charry ce parcours lui a apporté plus qu’un métier : « En reprenant Novex, j’ai acheté ma liberté ». Fort de ses qualités, il a insufflé une nouvelle dynamique à l’entreprise, notamment avec une vision tournée vers la santé féminine. Mindology, spécialisée dans les solutions pour la ménopause, vient de rejoindre le groupe Novex.
Damien de Charry incarne le repreneur moderne, prêt à prendre des risques pour aligner ses valeurs avec son travail. Sur la base d’un socle familial indéfectible, avec des formations solides, un réseau de qualité et une détermination sans faille, il prouve que la reprise d’entreprise est une voie aussi exigeante qu’épanouissante. Son seul regret ? « Ne pas avoir franchi le pas plus tôt ».
Afin d’identifier la bonne cible et se différencier, les futurs repreneurs doivent être proactifs sur le “marché caché”. Grâce à l’accompagnement de la CCI Paris Ile-de-France, Laurent Benkiewicz a pu profiter de ce “marché caché” pour mener à bien son projet de reprise.